De Bukittinggi à Kersik Tua (Kerinci)
Après une journée de repos à Bukittinggi pour me remettre de mes émotions, je reprends la route du sud, assez fréquentée jusqu’à Padangpanjang où je laisse la direction de Padang pour aller longer un bon moment sur une belle route plate le grand lac Singkarak, sur une vingtaine de kilomètres. Mérapi et Singgalang baignent aujourd’hui dans le soleil. J’ai vite perdu 800m d’altitude et ça chauffe.
Tout au bout du lac, des jeunes à moto, filles et garçons, fréquentent le grand parc de loisir de Sawalhunto. La route toujours bonne et agréable traverse une large plaine à rizières jusqu’à Solok. Je décide de continuer quoiqu’on m’annonce que je ne trouverai pas de chambre à Lubuk Sulasih la prochaine bourgade. Ça monte presque tout le temps, il pleut quand j’arrive dans la petite ville où j’aimerais bien faire étape, mais les policiers m’envoient sur Alahanpanjang, soi-disant à 17 km, en montée. Je me dis que je pourrais camper, il fait frais par ici et il y a de la forêt.
Effectivement, ça grimpe bien dans la forêt, puis à travers de belles plantations de thé sur des collines arrondies semblables à celles de Mirik vers Darjeeling en Inde. Je fais un beau parcours avec de magnifiques vues sur des rizières, des maraichages. Dans les villages, les cerfs-volants volent un peu partout. Au bout des 17 km, je demande à un jeune où est Alahanpanjang, encore 5km ! Et ça monte toujours entre les courtes descentes.
La nuit tombe, pas d’endroit « campable », je suis un moment avant de me décider à sortir la frontale, mais le peu de trafic devient vraiment dangereux dans les virages sans visibilité. Après ces 5 km, on m’en annonce 5 ou 6 autres ! J’ai presque envie de dormir dans un des abris sommaires de toile servant dans la journée de petits restos/bars, abandonnés en soirée, mais je continue. Je ne peux même pas apercevoir le lac Dibawah qu’on m’a dit joli. Dans ce qui pourrait être les faubourgs de la ville, j’arrête dans un grand resto vide, surprise, un serveur parle bien l’Anglais, ayant un peu voyagé en Europe. Il m’annonce que des bungalows en face se louent mais sont pleins. Il y a une sorte de guest-house plus loin, il appelle un ami qui va m’y guider à moto. Encore quelques kilomètres et des côtes. Après 140 km, j’arrive dans une « penginapan », on me montre une toute petite cellule sans fenêtre pour 200000 roupies ! La tenancière ne parle pas un mot d’Anglais. Pas moyen de faire descendre le prix, vue l’heure tardive et la quasi impossibilité de trouver autre chose, je finis par accepter. Le type à moto à ma grande surprise ne demande pas la pièce, les deux amis ont sûrement leur commission assurée. La douche froide après 13 heures de vélo à 1500m d’altitude, ça saisit ! Mes doigts blanchissent. Je ne sors pas de ma cellule, bruits de voies et télé mais je m’endors vite. Au matin, l’ambiance me parait plus conviviale, trois commerçants m’offrent le café. L’un d’eux fait du vélo et tente chaque année de s’illustrer sur le tour du lac de Singkarak, qu’il compare avec humour au tour de France.